Actualité - L’armée américaine lance un assaut massif en Irak
L’opération dénommée Arrowhead Ripper (arracheur de pointes de flèche) est une des plus importantes depuis mars 2003, date de l’invasion de l’Irak par les Etats-Unis. Elle est décrite comme une offensive visant à chasser les terroristes d’al-Qaïda de la province de Diyala, dont on dit qu’elle est devenue un nouveau bastion pour cette organisation.
En réalité, l’attaque a pour objectif d’écraser l’opposition à l’occupation américaine dans cette région où une majorité écrasante de la population s’oppose à la présence américaine et devient donc un centre de résistance dans lequel al-Qaïda joue un rôle décidément limité.
Dans un de ses premiers communiqués, le Pentagone a affirmé que dans le cadre d’un « assaut éclair de nuit aérien » par l’équipe de combat de la 3e brigade de Strykers , partie de la 2e division d’infanterie, des hélicoptères d’assaut et des forces au sol « avaient affronté et tué 22 forces anti-irakiennes dans et aux environs de Baquba ».
« Forces anti-irakiennes » est un terme à la Orwell que le commandement de l’armée américaine utilise pour décrire tout Irakien résistant à l’occupation américaine. Combien ont réellement été tués et quelle fraction était des civils et des combattants de la résistance n’est absolument pas clair.
L’offensive suit l’annonce la semaine passée que le renforcement des forces de combat américaines annoncé par le président George W. Bush en janvier dernier est maintenant complété, 30 000 soldats supplémentaires étant maintenant déployés en Irak.
L’opération est la plus importante depuis que les troupes américaines ont entrepris le siège meurtrier de la ville à majorité sunnite de Fallouja en novembre 2004, tuant des milliers de personnes, démolissant la plus grande partie des bâtiments et faisant des dizaines de milliers de réfugiés supplémentaires.
Baquba, à près de 50 kilomètres au nord de Bagdad, a environ la même taille que Fallouja. Les deux villes avaient une population tournant autour de 300.000 habitants avant la guerre. Il reste à voir si Baquba connaîtra la même dévastation que Fallouja.
Le siège de Baquba est mené en même temps qu’une série d’autres actions par les Etats-Unis et les forces alliées dans les banlieues sud de Bagdad ainsi que dans le sud du pays, à majorité chiite.
Dans Jubour, une région à majorité arabe au sud de la capitale, l’offensive a débuté par un raid de nuit mené par des bombardiers américains B-1, qui ont bombardé des régions densément peuplées avec des « bombes de précision ».
Pendant ce temps, plus au sud dans la province du Maysan, des forces américaines et britanniques ont lancé des attaques contre les miliciens chiites, qui ont répliqué par des tirs de mitraillettes et des grenades propulsées par roquette. Les forces d’occupation ont appelé des frappes aériennes qui tuèrent plusieurs dizaines de personnes. On assista ainsi aux combats les plus intenses entre les forces d’occupation et l’Armée du Mahdi depuis que cette dernière, milice loyale à l’imam chiite Moqtada al-Sadr, a mené durant deux mois un soulèvement contre l’occupation en avril 2004.
De chacun de ces fronts de la contre-offensive américaine contre la résistance irakienne ont surgi des reportages d’atrocités, de morts civiles, de raids systématiques de résidences et de captures de nombreux Irakiens en tant que « détenus de sécurité ». On pouvait voir parmi les reportages télévisés de Bakouba de longues files d’hommes irakiens les yeux bandés, maintenus sous la menace de fusils, ou entassés dans des véhicules pour être transférés à l’un des grands camps de prisonniers américains du pays.
Selon un article d’un journal irakien, la force offensive américaine déploya des chars d’assaut pour attaquer la mosquée Abudullah bin Mobark située dans le quartier des « enseignants » de Bakouba dimanche après-midi. Des témoins oculaires ont affirmé que la mosquée avait subi des dommages importants et que les maisons avoisinantes avaient aussi été endommagées, entraînant la mort de cinq civils, dont deux femmes.
Quant aux combats dans les quartiers du sud de Bagdad, l’Association des oulémas musulmans d’Irak (AMSI) a émis un communiqué de presse dénonçant l’arrestation massive d’au moins 20 personnes dans le village d’al-Ahmad al-Azzawi.
« Le crime s’est déroulé lorsque les forces d’occupation ont encerclé la zone et procédé à un débarquement sur les toits ; elles ont vandalisé le mobilier et les résidences et ont tué un citoyen (Hussein Mohamed Azzaoui) alors qu’il dormait dans son lit », a mentionné le communiqué.
Au sud de l’Irak, le journal irakien Az-Zaman rapporta que plus de 115 Irakiens, dont de nombreux civils, furent tués ou blessés dans les affrontements. Des témoins rapportèrent qu’au moins 32 cadavres, bon nombre d’entre eux des femmes et des enfants, de la ville d’Amarah, un point central des combats, furent conduits à la ville chiite sainte de Najaf pour y être enterrés lundi.
Au même moment, à Amarah même, le directeur des services de santé, Jamel Mohammed, a confirmé avoir reçu 16 corps et accueilli 37 blessés.
Le dirigeant du conseil de sécurité de la province, Latif al Tamini, a décrit l’opération comme une « catastrophe », déclarant que les troupes d’occupation avaient tiré au hasard.
« De nombreux innocents furent tués, car en été les gens dorment sur les toits pour avoir moins chaud », a déclaré aux médias Hamid Nouri, un ecclésiastique loyal à Sadr à Amarah.
Le porte-parole militaire britannique a déclaré que l’opération « était dirigée suivant les directives d’al-Maliki [le premier ministre] et du gouvernement irakien. Les forces opérationnelles spéciales irakiennes avaient pris beaucoup d’initiative. »
En réalité, ce qui a caractérisé toutes ces opérations c’est le rôle relativement mineur joué par les forces du régime fantoche irakien, les troupes et la force de frappe aérienne étrangère menant la grosse part de l’offensive.
Des officiers militaires seniors ont prévu que l’offensive ne pourrait pas continuer d’étouffer la résistance irakienne sans le déploiement de forces irakiennes substantielles prêtes à continuer l’offensive. Cependant, après quatre ans d’occupation américaine, ces forces n’existent toujours pas.
Le major-général Martin Dempsey, juste de retour d’une affectation de 22 mois en Irak où il dirigeait l’entraînement et l’armement des forces de sécurité d’Irak, exprimait les frustrations du Pentagone à propos des forces irakiennes, rapportant que les unités irakiennes étaient déployées à seulement 75 pour cent des forces sur papier à cause des désertions et des absences, alors qu’un policier sur six entraînés par les Américains a été tué, blessé ou a déserté.
Questionné par les médias à savoir s’il prévoyait que la prochaine unité irakienne en relève dans Bagdad allait être encore plus faible et moins capable de mener les opérations que celles déployées dans la capitale, il a répondu, « Je suis absolument convaincu que c’est ce que nous allons constater. »
Alors que l’offensive de l’administration Bush a été vendue comme une campagne devant apporter la sécurité dans Bagdad, le gros des nouvelles troupes déployées a maintenant été envoyé dans la capitale. L’échec de l’objectif de sécurité a tragiquement été mis en évidence encore une fois mardi, lorsqu’un gros camion explosif a frappé une mosquée chiite, tuant au moins 78 personnes et en blessant approximativement 200.
L’attaque contre la mosquée de Khillani dans le district commercial de Sinak à Bagdad est survenue deux jours seulement après que les autorités de l’occupation aient levé le couvre-feu imposé au lendemain de l’attentat à la bombe d’une autre mosquée à Samarra la semaine dernière.
Les comptes rendus de presse de la scène du dernier attentat à la bombe indiquent que les résidents locaux blâment les forces d’occupation américaines pour cette atrocité, plusieurs opinant que le champ est laissé libre à de tels attentats afin de semer la division entre les différents groupes religieux et ethniques irakiens.
(World Socialist Web Site)
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