Actualité - Rendons honneur à la mémoire de Bobby Sands et James Connolly
Le 90e anniversaire de l'Insurrection de Pâques à Dublin et le 25e anniversaire de la grève de la faim dans la prison H-Block à Belfast sont devenus jours de grande célébration pour le peuple irlandais et sont fêtés partout dans le monde. Assemblées publiques, marches, conférences, pièces de théâtre, films et expositions comptent parmi les nombreuses activités organisées en cette occasion. Les faits et gestes de ceux qui ont combattu pour l'indépendance en 1916 et le sacrifice courageux des dix grévistes de la faim qui ont donné leur vie en 1981 représentent le meilleur de ce que l'Irlande a à offrir. Ils personnifient le vaillant esprit qui a su enduré l'adversité pendant des siècles sous l'occupation coloniale de l'armée britannique.
Le parallèle entre les deux événements est très réel. Les actions de ceux qui ont combattu en 1916 ont ouvert la voie à l'indépendance de 22 des 29 comtés de l'Irlande en 1921, tandis que Bobby Sands et les patriotes irlandais qui ont donné leur vie pour leurs droits en tant que prisonniers politiques ont initié un mouvement pour le renouveau démocratique. Les soldats de l'Insurrection de Pâques et les grévistes de la faim partageaient la vision d'une Irlande indépendante et unie, affranchie du pouvoir étranger.
D'immenses foules ont assisté aux événements du 15 avril marquant le 90e anniversaire en Irlande. Dans plusieurs villes on a eu droit aux plus grandes manifestations de l'histoire récente.
Prenant la parole à la cérémonie sur la tombe de Bobby Sands, Joe McDonnell et Kieran Doherty à Belfast, le président de Sinn Féin, Gerry Adams, a dit que le gouvernement britannique les avait cruellement et cyniquement laissé mourir tandis que le gouvernement irlandais refusait d'intervenir. Il a lancé l'appel à tous les républicains de raconter à la nouvelle génération de républicains irlandais, surtout à la jeunesse, l'histoire de 1981 et de 1916.
Adams a dit que Padraig Pearse, un des leaders de la rébellion de 1916, avait parfaitement raison lorsqu'il a déclaré lors de son procès en cour martiale: «Pour nous la liberté est plus désirable que toute chose au monde. Si vous nous abattez aujourd'hui, nous nous relèverons et continuerons de lutter. Vous ne pouvez pas conquérir l'Irlande. Vous ne pouvez pas éteindre la passion des Irlandais pour la liberté.»
James Connolly de l'Insurrection de Pâques et les grévistes de la faim du H-Block avaient également une autre vision en commun: le renouveau du gaélique, la langue ancestrale des Irlandais, en tant que droit d'une nation opprimée et véhicule de la pensée et de la conception du monde irlandaises, et langue de la philosophie de la liberté irlandaise. «Il faut toujours se rappeler, disait James Connolly, que les nations qui se soumettent à la conquête et les races qui abandonnent leur langue en faveur de celle de l'oppresseur le font, non pas par altruisme ou par amour pour la fraternité humaine, mais par servilité et par crainte.» Une des meilleures contributions de Bobby Sands fut sa position en faveur de la langue irlandaise et des traditions, de la culture et du patrimoine du peuple irlandais. Il était un talentueux et prolifique auteur de prose, de chants et de poésie (voir le recueil: Skylark Sing your Lonely Song: An Anthology of the Writings of Bobby Sands), un magnifique raconteur (récitant des passages de livres appris par coeur à ses voisins de cellule).
Pour Bobby Sands, la langue, la culture et le patrimoine n'étaient pas des icônes détachées de la vie du peuple irlandais — de tout le peuple irlandais — ni quelque chose d'hostile à l'étranger.
Leur renouveau était lié à la liberté et à la lutte pour la conquête du pouvoir. Il s'opposait à la culture cosmopolite et nihiliste de l'impérialisme américain qui, avec ses édits de Kilkenny (1649), la dispersion subséquente des clans irlandais et le démantèlement du système de propriété communale de la terre, visait à détruire la nation irlandaise, à assimiler et angliciser le peuple irlandais, à désinformer sa conception du monde, à encourager le sectarisme et à soumettre le peuple irlandais une fois pour toutes. Pour Bobby Sands, le renouveau du gaélique était une composante importante du projet national d'une Irlande unie fondée sur l'égalité, la justice et la paix, et un moyen d'inspirer et de soulever le peuple irlandais pour la reconquête de son identité nationale au-delà des classes, des croyances, de l'âge et des convictions politiques.
Tel est l'esprit de l'irlandais pour qui l'éducation était illégale durant la Conquête, lorsque la tête des maîtres d'école était mise à prix. Mais la soif du savoir persista dans les profondeurs des prisons de Long Kesh et Armagh et vainquit l'oppression brutale et déshumanisante de l'occupant britannique et de la clique loyaliste. Dans leur isolement cellulaire, dans les profondeurs de forteresses militaires, de jeunes Irlandais et Irlandaises, vêtus d'une simple couverture, privés de vêtement et même, plus tard, de toilette et d'eau pour se laver, s'efforcèrent s'acquérir illégalement l'éducation et la langue que leur refusait l'occupant.
Bobby Sands, qui apprit l'irlandais durant son premier séjour à Long Kesh, l'enseigna inlassablement à ses camarades de prison — sans crayon ni papier, sans enregistreuse ou autre outil d'éducation. C'était à la fois un moyen de communiquer entre eux sans que les gardiens ne les comprennent et la reconquête d'un patrimoine volé. Cela leur procura une force spirituelle immense. Selon Gerry Adams, qui fut un des dirigeants de la campagne du H-Block en 1980-81: «La langue irlandaise était un des rares aspects de la vie carcérale qui aidaient les prisonniers à s'élever au-dessus des horreurs qui les assaillaient de partout. Elle les aidait à résister à l'oppression brutale qu'on leur infligeait.»
Il est connu que la transformation des prisons en Gaeltachts (zones gaélicophones) a contribué à élever le prestige de la langue irlandaise et à lui créer un nouvel espace, comme l'avaient fait James Connolly et les autres leaders de l'Insurrection de Pâques en 1916. Des jeunes s'inscrivirent en grand nombre à des cours d'irlandais en signe de solidarité.
Bobby Sands prisonnier politique fut élu à la Chambre des communes de Grande-Bretagne par le peuple irlandais à l'élection partielle de Fermanagh-Tyrone Sud le 10 avril 1981 avec 30 492 voix.
Il mourut dans la prison de Long Kesh le 5 mai 1981 à l'âge de 27 ans, le 66e jour de son héroïque grève de la faim. Cent mille personnes assistèrent à ses funérailles.
Le 11 juin, les Irlandais élurent deux des neuf prisonniers politiques qui s'étaient portés candidats à l'élection au parlement irlandais: Paddy Agnew et Kieran Doherty. Bien que députés d'un État étranger, les autorités britanniques les laissèrent mourir tous deux.
Vingt-cinq ans plus tard, c'est le nom, la mémoire et les nobles idéaux des héros de 1916 et 1981 que nous célébrons dans le monde entier.
Bobby Sands écrit: «Nous le peuple insurgé transformerons la tragédie en triomphe. Nous serons les porteurs d'une nation!»
(Mac-Talla, supplément gaélique publié chaque année par la revue Shunpiking, mai 2006)
Libellés : La lutte glorieuse du peuple irlandais
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