Actualité - Une autre attaque contre les droits environnementaux et souverains des Canadiens
Récemment, le gouvernement conservateur de Stephen Harper ressortait ses chiffres pour prouver que l'adhésion aux objectifs du Protocole de Kyoto seraient «ruineux» pour l'économie canadienne. C'était lors de la présentation de son programme environnemental annoncé après les grandes manifestations qui ont marqué le Jour de la Terre cette année. Le gouvernement canadien adhère aux plans de l'administration Bush aux États-Unis, plans qui ont comme caractéristique de faire primer le droit de monopole sur toute forme de responsabilité environnementale.
Il ressort que l'objectif central des initiatives annoncées les 25 et 26 avril par le ministre de l'Environnement John Baird n'était pas d'enchâsser dans la loi la responsabilité sociale de protéger l'environnement. Non, c'était d'introduire une exemption de responsabilité face aux gaz à effet de serre pour les entreprises qui entreprennent d'exploiter les sables bitumineux du Canada.
Comme c'est devenu l'habitude du «nouveau gouvernement du Canada», cet objectif n'a pas été annoncé directement. Nous l'apprenons en lisant un article du Globe and Mail du 27 avril intitulé: «Ottawa signale emissions break for oil sands» («Ottawa signale un exemption sur les émissions de GES pour les sables bitumineux»). Selon le Globe and Mail, la nouvelle réglementation du gouvernement «exempte les nouveaux programmes des obligations de réduction des GES pour les trois premières années».
Le processus par lequel les nouvelles réglementations sont établies mérite qu'on s'y arrête. La procédure parlementaire permet aux partis de l'Opposition de s'insurger contre le gouvernement pendant que le projet de loi est débattu et voté. Mais la réglementation qui met en oeuvre le projet de loi n'est pas débattue. Elle est la responsabilité exclusive du «gouverneur en conseil», c'est-à-dire le Cabinet, et la responsabilité de son application revient non pas au Parlement mais au ministre de l'Environnement, de sorte que les décisions servent les intérêts des monopoles plutôt que des électeurs. Tous ceux qui veulent empêcher les attaques des gouvernements contre les droits et libertés du peuple doivent s'intéresser à cet arrangement sur l'autorité d'application de la réglementation.
L'arrangement contient un vice qui a pour effet de faire primer le pouvoir des monopoles sur le pouvoir public et de décourager toute opposition par la voie juridique. Par exemple, la Loi sur les pêches considère comme une infraction grave que de détruire l'habitat et elle prévoit des amendes sévères pour les coupables. L'article 36 de la loi permet au Cabinet de fixer, et aux ministre des Pêches de faire appliquer, la réglementation spécifique de la loi. La première disposition à cet effet exempte spécifiquement l'industrie de la pêche de toute poursuite légale.
Le seul recours offert à la partie lésée est d'entreprendre des poursuites au civil pour dommages-intérêts. Et le seul recours d'autres parties contre le gouvernement est de contester une application spécifique, par exemple ce qu'on appelle les «ordonnances d'exception».
En 2003, le Centre d'action écologique de Halifax a préparé une contestation juridique contre une de ces «ordonnances d'exception» dans le but d'établir un précédent contre la liberté dont jouissent les grands chalutiers de râteler le fond marin et de détruire l'habitat, de sorte qu'il ne reste plus rien pour les petits pêcheurs indépendants. La cour fédérale a accepté d'entendre la cause, mais ce n'est qu'après qu'on a compris pourquoi.
Non seulement la cour a-t-elle jugé en faveur du maintien du privilège des grands chalutiers, mais elle en a profité pour établir par quelles voies un tribunal peut à l'avenir rejeter des appels contre les pouvoirs de réglementation du cabinet fédéral énoncés à l'article 35 de la Loi sur les pêches.
La cour fédérale a donc investi le gouvernement fédéral et les grandes compagnies de chalutage du pouvoir d'agir avec impunité. Cette impunité n'aurait sans doute jamais pu être accordée par la procédure normale de la Chambre des communes. Il s'agit d'un important précédent que les environnementalistes feraient bien de garder à l'esprit en planifiant leur réponse à ces récentes mesures du gouvernement Harper concernant les projets de sables bitumineux.
Dans le cas de cette réglementation, le Globe and Mail écrit: «Les grands émetteurs industriels devront réduire leurs émissions par unité de production de 18% dans les usines existantes pour les trois premières années et de 2% par année par la suite. Cependant, les entreprises qui ne peuvent pas atteindre ses objectifs pourront acheter des crédits auprès d'entreprises plus efficaces ou contribuer à un fonds de soutien à la technologie.»
L'article omet de préciser un aspect important. Les multinationales canadiennes et américaines qui dominent ce secteur ont l'intention d'établir un système d'échange de crédits d'émissions applicable uniquement aux entreprises opérant au Canada, aux États-Unis et au Mexique. Il ne s'agit donc pas de participer au système d'échange de crédits d'émissions que les pays en voie de développement réclament à l'ONU, système supervisé par une autorité contrôlée par les gouvernements participants et non pas par des groupements privés du capital financier. C'est donc un mécanisme d'exception pour préserver et protéger le «droit de monopole» et il s'inscrit dans le cadre du «Partenariat pour la sécurité et la prospérité» proposé entre les trois pays en vue de créer les États-Unis des Monopoles d'Amérique du Nord. Cela veut dire que la défense des droits environnementaux des Canadiens passe par l'opposition à l'annexion aux États-Unis.
Le but de cette variante de système de crédits d'émissions est spécifiquement de saper la création d'un système international basé sur le droit public. Le système auquel songent les multinationales permet aux grands et aux pires pollueurs d'acheter des crédits d'émissions à des entreprises plus petites et moins développés et leur accorde à toute fin pratique le droit de continuer de polluer sans répondre de leurs activités présentes et passées.
Ce que proposent le ministre de l'Environnement et son gouvernement se résume à ceci: 1) payer les riches avec des exemptions d'impôts s'étendant sur plusieurs années pour les inciter à rester de ce côté-ci de la frontière canado-américaine et 2) renoncer une fois pour toutes à tout financement public de programmes publics pour l'amélioration de l'environnement. On voit donc que ce problème dit «environnemental» est en réalité l'affaire d'un vaste mouvement politique non partisan.
L'élimination de programmes gouvernementaux de nettoyage de l'environnement est l'objectif de ces projets d'échange de crédits d'émissions depuis le début. C'est le gouvernement américain qui a proposé le premier programme d'échange de crédits d'émissions lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992, en opposition aux propositions de faire payer les pollueurs.
Avec les nouvelles propositions du ministre canadien de l'Environnement, tout ce qui aide à tripler l'exploitation des sables bitumineux et l'exportation de pétrole aux États-Unis d'ici 2015 constitue un acte de patriotisme qui doit être récompensé par des exemptions d'impôts, les plus grands pollueurs du secteur obtiennent l'impunité, les entreprises plus petites et moins développées qui peuvent vendre leurs crédits non utilisés aux plus grandes entreprises ont un moyen d'obtenir plus de capitaux et les Canadiens en vont les frais.
Contrairement à ce que propose l'approche centrée sur le capital du gouvernement canadien et des partis d'opposition concernant les défis environnementaux, en ce XXIe siècle la préservation et l'humanisation de l'environnement doivent être l'objet d'importants programmes sociaux. Les nouvelles propositions du gouvernement conservateur montrent la nécessité de s'organiser pour établir des gouvernements qui arrêtent de payer les riches et augmentent le financement des programmes sociaux.
(Le Marxiste-Léniniste, Gary Zatzman)
Libellés : La lutte contre la dévastation de l'environnement naturel
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