vendredi, avril 14, 2006

Actualité - Posada, c’est quoi au juste?

Franc-Parler publie un article de Granma International traitant du cas de Posada Carriles, un terroriste anticubain lié à la CIA qui est recherché dans plusieurs pays en Amérique latine. Le gouvernement américain le protège actuellement au nom "des droits humains". La guerre au terrorisme mené contre les peuples du monde par l'impérialisme américain met en lumière que le terrorisme est pour l'impérialisme une notion à géométrie variable. Une définition du terrorisme sans principes ne peut créer autre chose que l'impunité et le terrorisme d'État.

Après l’avoir utilisé pendant plus de 40 ans, le gouvernement des États-Unis entendra prochainement Luis Posada Carriles pour recevoir sa demande de citoyenneté «pour services honorables rendus à la nation», affirme son avocat, Eduardo Soto.

De sorte qu’après avoir travaillé durant quatre décennies dans une longue succession d’opérations secrètes parmi les plus sales des services de renseignement nord-américains… Posada doit s’agenouiller devant son maître pour mendier la citoyenneté nord-américaine?

«Comment peut-on avoir été à Fort Benning, avoir été second lieutenant de l’armée étasunienne et ne pas être citoyen nord-américain?», se demande José Luis Mendez, chercheur respecté et auteur de plusieurs livres sur le terrorisme contre Cuba, en entrevue avec Granma international.

«Quel statut a-t-il maintenant, ‘parolee’, résident, réfugié politique? Posada, c’est quoi au juste? Un mercenaire dans l’armée nord-américaine, un officier d’une armée fantôme?», demande le spécialiste.

Selon le quotidien El Nuevo Herald, de Miami, Soto, le défenseur de Posada, déclare avoir reçu « un appel de
Washington » par lequel on lui a indiqué que «des fonctionnaires du Bureau de l’immigration et de la citoyenneté» souhaitaient rencontrer son client.

Pour Mendez, le sujet de la citoyenneté de Posada comporte une longue succession d’incidents contradictoires dont il cite quelques-uns.

Honduras 1992: Posada visite l'ambassade US

Comment est-il entré à l’ambassade des États-Unis en 1992, au Honduras — avec un passeport salvadorien au nom de Franco Rodriguez Mena ou un autre de ses pseudonymes — si, en réalité, c’est Luis Posada Carriles qu’on cherchait?, demande Mendez.

Cette visite a lieu le 7 février 1992. Le terroriste a alors une réunion amène avec l’agent spécial du FBI George Kiszynski — dont il dit être l’ami— et un collègue, Michael Foster, de 9h à 16h, dans le local numéro 426 de l’ambassade étasunienne de Tegucigalpa. Kiszynski a conversé avec Posada, fugitif de la justice vénézuélienne et terroriste notoire, sur chaque aspect de sa participation dans les opérations clandestines et criminelles en 1985 et 1986 sur la base aérienne salvadorienne d’Ilopango.

La réunion est racontée dans un document déclassifié publié le 9 juin 2005 par les Archives de sécurité nationale de l’Université George Washington.

«Cet agent spécial du FBI (Kiszynski) apparaît dans mon dernier livre. Il est d’origine chilienne. Il a dirigé «Bombillo» Gonzalez pour réaliser des actions contre des intérêts nicaraguayens durant les années 80. Dans les années 90, on l’a appelé depuis le Guatemala, pour le prévenir des attentats qui se produiraient à La Havane», raconte Mendez.

Sierra Leone, 1997 : Il se réfugie à l'ambassade US

«Posada a raconté un jour, à María Elvira Salazar, à la télévision de Miami, qu’il avait été au Sierra Leone quand s’était produit une opération militaire et qu’il s’était réfugié à l’ambassade nord-américaine. Il a dit avoir alors utilisé un passeport nord-américain».

Le terroriste fera la même affirmation dans son entrevue avec Ann Louise Bardach et Larry Rohter publiée par The New York Times le 12 juillet 1998. Il assure alors qu’il a un passeport étasunien. Il a confirmé l’avoir utilisé pour trouver refuge à l’ambassade des États-Unis au Sierra Leone, quand sont survenus les troubles de 1997, dans des circonstances qui restent à éclaircir.

Selon Bardach et plusieurs experts, Posada a effectué, illégalement, au cours des années, de nombreux voyages en territoire nord-américain. Quand il accorde cette entrevue à Bardach, à partir du 18 juin 1998 et durant trois jours, Posada révèle qu’il dispose alors de quatre passeports différents.

Le terroriste a voyagé plusieurs fois aux États-Unis entre août 1997 et avril 2000, selon ce que l’on constate dans un relevé des mouvements migratoires de Franco Rodríguez Mena, effectué le 18/ 11/ 2000 par la Direction Générale de l’immigration du Salvador. C’est ce qu’a révélé le journaliste et chercheur Raul Gomez dans un article publié par le site web Rebelion, en septembre dernier.

En 1997, tandis que se produisent des explosions dans les hôtels havanais, Posada Carriles entre aux États-Unis, le 26 août, sur le vol 730 de Taca international à destination de New York. Le 10 avril 1998 — alors qu’il prépare son plan pour assassiner le président de Cuba en République dominicaine — il a voyagé une autre fois en territoire nord-américain, en utilisant le passeport salvadorien A143258.

«Comment a-t-il pu être au service de la CIA, aux États-Unis, entre 1961 et 1966?», demande encore Mendez.

«Et comment est-il passé au Venezuela ? Comment est-il entré? Comme Cubain? Avec quel passeport, qui le lui a renouvelé durant toutes ces années?»

Qui est allé à la prison, au Panama?

Posada est entré au Panama le 5 novembre 2000. Son statut migratoire pendant ce séjour dans le pays de l’isthme est également équivoque.

«Posada est entré au Panama comme étant Franco Rodríguez Mena et Gaspar Jiménez Escobedo comme Manuel Díaz. Qui est allé à la prison de Panama pour documenter Jiménez, citoyen des États-Unis? Si ce ne fut pas l’INS (le Service d’immigration et de naturalisation étasunien, à l’époque), Jimenez serait alors entré avec de faux documents aux États-Unis ? Qui les lui a donné?»

«Si c’est une documentation nord-américaine, c’est donc l’INS que l’a préparée pour qu’il entre avec sa véritable identité à Miami. Y a-t-il eu, oui ou non, complicité pour son entrée aux Etats-Unis ? Si ce n’est pas le cas, comment Jiménez est-il alors entré avec de faux documents ? N’est-ce pas un délit aux Etats-Unis d’entrer avec de faux documents?»

Le cas de Posada est similaire, poursuit Mendez. «Il était en prison comme Salvadorien: comment est-il sorti de là? Comment les fonctionnaires salvadoriens l’ont-ils mis sur l’avion? Comme Rodriguez Mena? On sait que cela fut avec un faux passeport nord-américain — au nom de Melvin Cloide Thompson — qu’il est arrivé au Honduras où Rafael Hernández Nodarse le lui a donné. L’immigration nord-américaine est allé documenter Jiménez. Mais pas Posada ? Il est sorti du Panama sans papiers ?».

Le chercheur cubain a une opinion très claire. «J’ai la conviction que l’INS l’a préparé… Et si ce n’est pas ainsi, alors comment que cela s’est-il passé… qu’ils démontrent le contraire !»

Le 26 août 2004, Pedro Crispín Remón, le tueur d’Omega-7, Gaspar Jiménez et Guillermo Novo, assassins du CORU, sont arrivés à Miami du Panama, en jet privé, quelques heures après leur libération subreptice, à 5h du matin, par une présidente mafieuse. Posada, pour sa part, s’est volatilisé. Il voyageait sous la protection du FBI, affirme un témoin, l’avocat hondurien Juan Carlos Sánchez.

L’entrevue de Posada avec les services de naturalisation s’effectueront à El Paso, au Texas, le 20 avril prochain.

Dans une lettre adressée, il y a quelques jours, au délinquant international, les Services d’immigration et des douanes du Département de la sécurité de la patrie le qualifiaient de «danger pour la communauté et la sécurité nationale» des États-Unis.

(Granma International - Jean-Guy Allard)

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