samedi, janvier 27, 2007

Actualité - Marti journaliste

L’exercice du journalisme a occupé une bonne partie de la vie et de l’attention de José Marti, qui a publié son premier texte dans la presse avant l’âge de 16 ans.

Si la postérité a fixé l’image littéraire du Marti poète, ses contemporains l’ont connu et admiré surtout pour ses écrits pour les journaux, car les deux recueils de poésies qu’il a édités par ses propres moyens ont été distribués par lui-même comme cadeau parmi ses amis et connaissances, alors qu’ils pouvaient apprécié ses textes dans plus d’une dizaine de journaux hispano-américains. Et il est évident que l’éventail des lecteurs de cette presse dépassait largement celui de la poésie.

Pour les spécialistes du style de Marti il est indispensable d’examiner cette prose pour pouvoir comprendre la transformation que le révolutionnaire a opéré dans la langue espagnole, comme ceux qui se consacrent à étudier sa pensée savent que ces écrits pour la presse renferment les divers sujets et affaires qui ont attiré son attention.

L’entrée «professionnelle» de Marti dans le journalisme est survenue à 22 ans, durant son séjour au Mexique, entre 1875 et 1876, et on peut dire qu’elle a été fortuite. Sa famille s’était établie dans la capitale et le jeune, après avoir obtenu ses diplômes d’avocat et de licencié en philosophie et en lettres en Espagne, il est parti rejoindre ses parents et ses sœurs, avec l’idée d’assumer leur entretien par le biais de la pratique du droit.

Sa famille, entre-temps, avait trouvé du soutien chez un voisin mexicain qui occupait un poste dans l’administration du District Fédéral, et qui a accompagné le père de Marti à l’attendre à la station de chemin de fer le soir de son arrivée.

Manuel Mercado a été cet homme providentiel qui non seulement est devenu son ami intime auquel le Cubain a confié dans ses lettres ses émotions et ses objectifs politiques, mais, en outre, qui lui a ouvert les portes de la société mexicaine à travers ses vastes relations.

Ce fut Mercado qui l’a amené à la Revista Universal, un quotidien du parti au pouvoir qui rassemblait alors le gratin des lettres mexicaines de l’époque.

Curieusement, le premier texte publié là-bas par Marti a été un poème dédié à l’une de ses sœurs décédée quelques semaines avant son arrivée, ainsi que d’autres vers qui ont été inclus dans des éditions postérieures du journal. Cependant, depuis mars 1875 sa plume a fait partie de cette rédaction, dans laquelle il a appris l’art du métier et couvert les genres les plus divers.

Dans la Revista Universal, Marti a publié de nombreux articles de fond sur divers sujets nationaux ou internationaux, écrit des comptes-rendus pour la section intitulée «Courrier des théâtres»; il s’est occupé aussi durant une quinzaine de jours du Bulletin parlementaire qui donnait des informations sur les débats dans l’Assemblée législative mexicaine, publié une traduction du français et un conte, et rassemblé fréquemment ses articles non signés dans la section Entrefilets et Échos.

Il n’y a aucun doute que le journaliste s’est formé dans ce quotidien en complétant les espaces qui manquaient à l’heure du bouclage du soir du journal, ajustant la chronique du jour à l’espace qui lui était réservé, écrivant au moment de la clôture ce qu’un autre confrère n’avait pu terminer. Écrivain de la rédaction, amoureux du plomb et de l’encre d’imprimerie, attentif au typographe pour éviter les errata qui le préoccupaient tellement, Marti a été à Mexico un très bon journaliste.

Sa période de journaliste au Mexique est une source importante pour connaître le processus de formation de ses idées et de son style, c’est pourquoi les spécialistes ont fréquemment utilisé ses articles.

Mais depuis peu de temps on a aussi confirmation que Marti a aussi écrit de nombreux échos pour la section correspondante de la Revista Universal, d’abord appelée «Echos de toutes parts» et ensuite «Entrefilets».

A travers un examen rigoureux du style de chaque nouvelle brève et des sujets qui y sont abordés, les spécialistes du Centre des études de Marti chargés de l’édition critique de ses œuvres complètes, ont détecté que plus d’une centaine de nouvelles brèves, jamais rassemblées auparavant, étaient l’œuvre de Marti.

Dans le journalisme d’alors, les entrefilets et les échos embrassaient un vaste éventail de sujets, tous caractérisés par leur valeur d’information. Une bonne partie de ces textes seraient considérés aujourd’hui comme des articles d’information, même si ce genre d’article était aussi utilisé pour la polémique et le débat politique.

Les échos de la Revista Universal de Mexico se situent dans cet esprit, et bien que la section avait un rédacteur responsable, il était habituel que d’autres membres de l’équipe du journal s’y expriment, souvent d’une manière sous-entendue, et parfois avec les initiales du collaborateur occasionnel.

Cela arrivait souvent à Marti, qui s’est vu obligé plus d’une fois de polémiquer, surtout quand un autre journal combattait sa défense habituelle de l’indépendance de Cuba. Ce genre de sujet traité a amené les spécialistes à lui attribuer de nombreux échos, de même que la perspective latino-américaniste, la préoccupation pour la création artistique et les avancées technologiques et scientifiques, l’importance conférée à l’éducation et, surtout, le style éducatif.

De même que dans le reste de son journalisme et, particulièrement, comme c’est manifeste dans une époque postérieure où il a écrit des échos, ces textes publiés dans la Revue Universelle montrent, malgré leur brièveté et l’aspect éphémère des informations dans de nombreux cas, un trait singulier de son style journalistique et de tous ses écrits: l’exercice de l’examen, l’expression d’une opinion, et le jugement basé sur une éthique humaniste et de solidarité.

Les échos mexicains démontrent une fois de plus la haute dignité et le respect professionnel que conférait Marti à la pratique du journalisme. Le simple article non signé avait pour lui la même valeur qu’un article de fond bien en vue sur une page.

Les échos les plus brefs ont été pour lui un moyen aussi important que les autres pour répandre ses idées et accomplir le devoir qu’il attribuait au journalisme dans l’un de ses articles intitulés Bulletins pour la Revue Universelle: «La presse n’est pas la douce révérence ou la colère insultante; c’est la proposition, l’étude, l’examen et le conseil»

(Granma International - Pedro Pablo Rodriguez)

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