lundi, janvier 29, 2007

Actualité - La lutte pour la propriété publique des ressources énergétiques: importante composante de la lutte pour un gouvernement anti-guerre

La nouvelle à l'effet que les chefs d'entreprise de l'industrie pétrolière et des représentants des gouvernements canadien et américain se sont rencontrés à Houston, au Taxas, en janvier 2006 et décidé que le Canada devait quintuplé sa production de pétrole en provenance des sables bitumineux de l'Alberta a soulevé beaucoup d'inquiétudes. Et à juste titre. Ils veulent une production de cinq millions de barils par jour, ce qui veut dire à toutes fins pratiques que dorénavant les sables bitumineux de l'Alberta seront territoire privé des États-Unis, avec un partage des responsabilités bien précis: le pétrole ira aux États-Unis tandis que les coûts, humains et environnementaux, seront défrayés par les Albertains et les Canadiens en général, et le tout pour alimenter la machine de guerre américaine.

Comme la rencontre secrète Banff en septembre, qui réunissant les chefs d'entreprise de l'industrie pétrolière et ceux de la défense des États-Unis, du Canada et du Mexique, la rencontre de Houston s'est tenue en cachette. C'était une rencontre secrète pour discuter de l'avenir économique du pays. S'il y a une chose qui ressort clairement de tout cela, c'est que les affaires politiques du Canada sont totalement dictées par l'impérialisme américain, comme le sont les affaires économiques.

Le pétrole tiré des sables bitumineux devient rapidement la principale source de pétrole en Alberta, comparativement au forage conventionnel. L'Alberta estime que la production de pétrole des sables bitumineux atteindra 3,5 millions de barils par jour d'ici 2020. Selon Énergie Alberta, 45 milliards $ ont été pris à l'économie sociale pour bâtir les usines de traitement de ce pétrole depuis 1996, année où les redevances à payer pour le pétrole ont été réduites. On prévoit que l'économie socialisée du Canada paie un autre 56,6 milliards $ pour ce projet de 2006 à 2011.

Le rôle principal de l'Accord de libre-échange de l'Amérique du Nord (ALÉNA) pour ce qui est de l'industrie pétrolière est de voir à ce que le pétrole des sables bitumineux du Canada soient à la disposition des besoins de nos voisins du sud. Le Canada est un exportateur net de pétrole. Mais le Canada importe chaque jour à peu près l'équivalent de ce qu'il exporte aux États-Unis. Il exporte aux États-Unis 63% de son pétrole et 56% de son gaz naturel. L'ALÉNA contient une clause sur la proportionnalité qui stipule que le Canada doit continuer d'exporter la même quantité de gaz et de pétrole qu'au cours des trois dernières années. Tant que le Canada demeure dans l'ALÉNA, il est prisonnier de cette clause.

La demande que le Canada quintuple sa production de pétrole veut dire que le Canada doit exporter toute sa production des sables bitumineux aux États-Unis. Ce pétrole ne sera pas produit pour répondre à la demande au Canada et le Canada ne sera pas en mesure d'exporter du pétrole des sables bitumineux à d'autres pays que les États-Unis. Les Américains disent que c'est pour eux une question de sécurité nationale. En langage clair, cela veut dire qu'ils veulent que le Canada soit pour eux une source «sécuritaire» de pétrole et qu'il ne vende pas son pétrole à leurs concurrents ou adversaires, comme la Chine, qui a exprimé beaucoup d'intérêt pour les sables bitumineux du Canada. La demande américaine est intimement liée à la guerre et à l'agression.

Que signifie pour le Canada quintupler sa production de pétrole? À regarder les chiffres cités par le gouvernement albertain, cinq millions de barils par jour ne semble pas énorme puisque l'Alberta aurait des réserves illimitées. Mais, délibérément, le gouvernement albertain ne donne ainsi qu'un tout petit aperçu de ce que veut dire une augmentation si formidable de la production pétrolière à partir des sables bitumineux. Pour extraire le pétrole du goudron (que les monopoles pétroliers appellent maintenant «sables bitumineux» parce que c'est «plus propre»), il faut non seulement une infrastructure énorme, mais des quantités énormes d'eau et d'énergie. En ce moment c'est le gaz naturel qui sert à fournir cette énergie. Selon une étude de l'Institut Pembina, ce niveau de production nécessiterait une consommation quotidienne de deux fois et demis la quantité de gaz naturel nécessaire pour chauffer tous les foyers du Canada en un jour. C'est plus que la production totale qu'on prévoit tirer du projet de la Vallée du Mackenzie.

Le projet de pipe-line de la Vallée du Mackenzie, formulé d'abord dans les années 1970, s'est vite heurté à la résistance des communautés autochtones. La Commission Berger présidée par le juge Thomas Berger avait établi que le projet aurait un impact destructeur énorme pour les peuples autochtones et leurs terres ancestrales, où passeraient les pipe-lines. La Commission a demandé un moratoire pour qu'on examine de plus près les revendications territoriales des peuples autochtones avant de procéder. Trente ans plus tard, les réclamations territoriales ne sont toujours pas résolues mais on a recommencé à dessiner les plans de construction des pipe-lines.

Face à l'opposition populaire à l'utilisation du gaz naturel à cette fin, le parti au pouvoir propose maintenant d'utiliser des réacteurs nucléaires!

L'exploitation massive, hors du contrôle des Canadiens, qui ne tient pas compte de la protection de l'environnement naturel et social, a un potentiel destruction inimaginable. En plus du problème des gaz à effet de serre, il y a l'épuisement de la rivière Athabasca et des aquifères sous-terrains et les énormes bassins de substances toxiques que cela produira. Les usines comme Suncor et Syncrude prétendent avoir des programmes de restitution des terres et de l'environnement, mais ce sont des prétentions farfelues. Avec des projets de cette ampleur, personne ne sait vraiment quelles seront les conséquences.

Il faut aussi tenir compte des coûts sociaux pour les peuples autochtones, dont les terres ancestrales couvrent les sables bitumineux dont il est question, et pour les travailleurs qui construisent les usines et les pipe-lines. Entre autres, avec une augmentation si rapide de la production pétrolière, on ne tardera pas à alimenter la peur à propos de la «pénurie de main-d'oeuvre», peur qui sert présentement à justifier des lois antiouvrières et antisyndicales, la division de la classe ouvrière et la création d'une caste de travailleurs totalement asservie aux besoins des capitalistes monopolistes.

Au nom de la «sécurité nationale», qui veut dire en pratique la domination et l'hégémonie mondiales, les États-Unis se sont avérés capables des pires crimes contre les peuples du monde, y compris même contre la classe ouvrière et le peuple des États-Unis.

L'appel du Marxiste-Léniniste à placer la production et la distribution du pétrole sous contrôle d'un monopole public est très à propos. Il est essentiel de mettre fin aux tractations secrètes qui se font dans le dos des Canadiens. Une partie de la lutte pour un gouvernement anti-guerre au Canada consiste à empêcher l'impérialisme américain de se servir des ressources énergétiques du Canada pour alimenter sa machine de guerre.

* Peggy Morton est secrétaire du Comité régional de l'Alberta du Parti communiste du Canada (marxiste-léniniste) et candidate du Parti marxiste-léniniste du Canada dans Edmonton-Centre.

(Le Marxiste-Léniniste - Peggy Morton*, 22 janvier 2006)

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